Boisson créée par les Néerlandais au cours du XVIe siècle, le gin est un spiritueux qui connaît un exceptionnel regain de popularité. Importé par les Anglais, son histoire est liée à celle du Royaume-Uni et de ses colonies orientales. S’il fut souvent un alcool de contrebande lors des différentes prohibitions mondiales, le gin est aujourd’hui un produit haut de gamme, car ses bouquets aromatiques sont toujours plus sophistiqués et travaillés. Des distilleries voient le jour partout, et leur essor en France est spectaculaire.
La gamme des gins est étendue et peut déconcerter certaines personnes.
Il faut donc d’abord savoir ce qu’est le gin.
La base est un alcool neutre généralement obtenu à partir d’orge, de maïs, de seigle ou de betterave. Mais certains gins sont distillés sur une base d’alcools de raisin ou de fruits, par exemple. Cet alcool de base titre plus de 96 degrés et va ensuite être aromatisé de différentes façons.
L’ingrédient principal d’un gin est la baie de genièvre. (On pourrait donc considérer que son ancêtre est le “genever” distillé dans le Nord de la France, en Belgique et aux Pays-Bas.) Un gin classique contiendra aussi des graines de coriandre et de la racine d’iris. Ensuite, les botaniques, épices et fruits, locaux ou exotiques, seront utilisés selon le souhait et le goût de chaque distillateur qui va élaborer ses recettes. Comme en cuisine, l’inspiration, l’imagination voire le hasard vont alors prendre le pouvoir, quasi sans limites.
La tendance aromatique des gins peut être classifiée en sept registres : fruité, agrumes, épicé, boisé, sucré, herbacé et floral.
Les arômes du gin sont obtenus par différentes méthodes – macération, infusion, distillation, vieillissement –, qui peuvent être combinées les unes avec les autres. Mais le point commun des gins est la distillation traditionnellement effectuée dans des alambics de cuivre, chauffés au bois ou au gaz. Peut-être vous souvenez-vous des bouilleurs de cru ambulants de votre enfance ou d’un alambic de village à l’abri d’une cabane ? Mais, comme en tous domaines, le progrès est passé par là, et le matériel et les techniques évoluent.
Après la distillation s’ensuit une étape nommée “réduction” qui consiste à ajouter lentement de l’eau pure afin de baisser le taux alcoolique du spiritueux. La teneur minimale requise pour justifier de l’appellation “gin” est de 37,5 degrés.
Voici un aperçu des différentes catégories de gin.
Nous commencerons par les plus médiocres :
• Le bathtub gin (ou gin de baignoire…)originellement concocté dans sa baignoire en faisant macérer des aromates dans un mauvais alcool, souvent de contrebande.
• Le compound gin (ou gin mélangé) n’est pas distillé. On ajoute à l’alcool de base des arômes naturels ou artificiels. Il s’agit d’un gin bas de gamme et bon marché.
Découvrons à présent les gins dignes de ce nom :
• Le London dry gin (qui n’a rien de londonien) obéit à des règles strictes de fabrication. Après macération séparée ou commune, les baies de genièvre et les autres ingrédients sont distillés ensemble. La palette aromatique se dessine au cours de cette distillation. Aucun adjuvant artificiel n’est toléré, il doit titrer 37,5 degrés et ne doit pas vieillir.
• Le distilled gin (ou gin distillé) est obtenu après la distillation en alambic de l’alcool, des infusions et des macérations. Ces distillations peuvent s’effectuer en plusieurs passes individuelles suivies de leur assemblage. L’ajout de sucre, d’essences ou d’arômes est autorisé après la redistilation. Il doit titrer au moins 37,5 degrés.
• L’Old Tom gin doit sont nom aux enseignes représentant un chat qui signalaient les bars clandestins anglais au XVIIIe siècle. On y délivrait un alcool de contrebande abondamment sucré afin d’en masquer le goût infect. Aujourd’hui, l’old Tom gin est légèrement sucré, mais sa distillation et sa composition sophistiquée en font un spiritueux haut de gamme qui sublime de nombreux cocktails et séduit les amateurs néophytes.
• Le yellow gin est un gin distillé qui a séjourné pendant quelques mois dans des fûts de chêne ou de bois exotiques, ce qui lui procure, outre sa teinte jaune spécifique, des arômes boisés.
• Le navy strength gin est un gin distillé qui se caractérise par son titrage alcoolique supérieur à 57 degrés. Son origine remonte à la Royal Navy anglaise du XIXe siècle qui emportait par bateaux des tonneaux de gin dans ses colonies orientales.
• Le sloe gin est une liqueur à base de gin et de prunelles à laquelle on ajoute du sucre et qui titre entre 15 et 30° au maximum après la réduction. Aujourd’hui, d’autres baies et fruits peuvent accompagner les prunelles. Leur robe est généralement d’un rouge très soutenu.
Comment se déguste le gin ?
Après l’avoir humé, il est intéressant de commencer par goûter le gin nature. En effet, les gins contemporains sont de plus en plus travaillés et leurs distillateurs font preuve d’audace dans leur conception. Leur imagination ne connaît aucune borne et ils marient les fruits et les fleurs qui s’épanouissent dans leurs jardins, des épices et des agrumes du bout du monde, des plantes, des algues… On peut comparer ces distillateurs aux “nez” de la parfumerie.
Mais il est vrai que le gin peut être estimé trop vif. Alors, allongeons-le tout d’abord en ce fameux gin tonic, originaire des colonies anglaises décimées par la malaria. Le pouvoir de la quinine contre le paludisme venait d’être découvert. Mais on en masquait l’intense amertume avec du gin et de l’eau gazeuse sucrée… Aujourd’hui, le champ des cocktails est infini et comme chez les distillateurs l’imagination des bartenders est sans limite.
Une seule règle cependant à retenir pour un cocktail réussi : un très bon gin (français de préférence…) et des tonics de qualité. Dans ce domaine aussi, la gamme est variée et les saveurs originales de ces tonics s’harmonisent à celles des gins et les magnifient. On peut aussi marier le gin avec des jus de fruits, des sirops, des sodas ou de la limonade.
L’avenir du gin français
Le gin français figure en bonne place dans les classements des meilleurs gins du monde grâce au savoir-faire, à la rigueur et à l’inventivité des distillateurs, petits ou grands, qui jalonnent l’Hexagone. Le gin connaît un réel regain depuis quelques années, car sa gamme aromatique et sa finesse exceptionnelles séduisent les amateurs les plus exigeants et permettent aux débutants de découvrir un nouvel univers gustatif. Par ailleurs, il faut noter la recherche esthétique de ses flacons, et la créativité graphique de ses étiquettes. Quand le beau s’ajoute au bon, que demander de plus ?